
Tout le monde me l’avait dit. Et alors, quand je me suis lancée dans la lecture des Trois mousquetaires, mes interlocuteurs me le répétaient « Mais tu as déjà lu Le comte de Monte-Cristo ? Tu dois lire Le comte de Monte-Cristo ! ». Même les gens qui lisent peu semblent soudain se réveiller quand ils entendent « Alexandre Dumas » et se trouvent prêts à te recommander en trépignant ces 2000 pages de bonheur alors qu’ils s’endorment aujourd’hui devant les dix pages d’un thriller populaire.
« Mais c’est pas possible, pensai-je alors à chaque fois, il doit y avoir une société secrète du Comte de Monte-Cristo et ils doivent s’échanger des bracelets comme les Swifties ! »
Le souci avec le succès, c’est qu’il est effrayant : un livre qui plaît à tout le monde, c’est un livre qui plaît à n’importe qui, probablement. Je n’avais pas une folle envie de me jeter dessus. Ainsi, j’ai commencé Le comte de Monte-Cristo pour la même raison que j’ai fait connaissance avec Les trois mousquetaires : le cinéma. J’étais dans mon fauteuil rouge quand j’ai vu une bande-annonce de l’adaptation du roman de Dumas. Et moi, comme toute personne agaçante digne de ce nom, j’aime avoir lu le livre avant pour me faire un avis sur un film. J’ai donc ouvert Le comte de Monte-Cristo en ayant à la fois une extrême confiance en Alexandre Dumas et une extrême appréhension d’être déçue.
Finalement, c’était palpitant. Il m’a fallu peu de temps pour développer une obsession pour Edmond Dantès et pour ce feuilleton haletant que la vie active ne cessait d’interrompre désagréablement. Je crois bien avoir aimé chaque partie du roman et malgré quelques ficelles narratives cousues de fil blanc, j’y ai trouvé des surprises et des rebondissements. Moi qui suis une grande adepte de la vengeance, j’ai aimé frémir vers les derniers chapitres en réalisant que j’étais confrontée à mes propres limites sur ce thème. L’aspect sensationnel de l’intrigue ne fait étrangement pas d’ombre aux réflexions portées sur la condition humaine, l’existence, le temps. Les personnages grandissent, mûrissent, s’épanouissent ou s’assombrissent, éclosent ou se fanent au fil des pages et qu’ils sont nombreux à être intéressants !
Bref, j’ai été mordue du livre, un peu moins d’Edmond, et maintenant, je fais partie de la secte fiévreuse qui demande, l’air de rien, avec une intonation parfaitement innocente : « Tu as déjà lu Le comte de Monte-Cristo, toi ? ».
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